Bâtisseurs de ruines - L’exemple français (1993)
Éditorial [« la marche du temps »] du numéro 17 de la revue Futur antérieur (juillet 1993)
Le suicide de Pierre Bérégovoy [1], au-delà d’une tragédie personnelle qui n’appelle que le respect, marque la fin d’une époque : l’effondrement de l’expérience gouvernementale socialiste, la clôture définitive d’une période de l’histoire européenne datée par 1968, l’épuisement d’une tradition politique séculaire, fonds commun de l’ensemble de la gauche instituée.
À l’heure où s’accumulent les bilans, une explication semble dominer : emportée par une logique gestionnaire, évincée de la défense de ses propres valeurs, isolée de l’électorat populaire, la gauche aurait trahi sa victoire de 1981. Mais derrière cette apparente certitude surgit pourtant une interrogation : la victoire en question ne reposait-elle pas sur une secrète défaite sur laquelle il conviendrait de demeurer aveugle, parce que ce point aveugle fut la condition du succès électoral ?
1. La défaite de 1981
L’élection de 1981 a porté au pouvoir une coalition appuyée sur un programme qui était, en dépit de toutes les réserves qu’il pouvait inspirer, le plus radical qu’ ait défendu, depuis l’après-guerre, la gauche officielle des pays capitalistes avancés. Cette radicalité était le reflet, atténué, déformé, des mouvements sociaux qui agitaient la France depuis une décennie : luttes nées en Mai 68 qui faisaient encore sentir leurs effets en dépit d’un ralentissement observable dans toute l’Europe après 1975, combats contre les conséquences de la crise (telles les mobilisations des sidérurgistes). Une volonté diffuse de changement était alors largement perceptible. C’est elle qui se traduisit dans le vocabulaire de « rupture » utilisé par les rédacteurs du Programme Commun de la Gauche.
Mais ceux qui formulaient ainsi leur volonté de dépasser le capitalisme restaient enfermés dans une tradition (parfois pompeusement baptisée « stratégie ») qui conçoit le changement social comme le résultat d’une action quasi-exclusive de gouvernement : une culture étatique, partagée non seulement par la gauche radicale et socialiste, mais aussi par le Parti communiste, et incarnée par ce brillant homme de pouvoir que fut toujours François Mitterrand.
Il fallait donc une victoire aux présidentielles. Mais cet objectif, en soi légitime, ne pouvait être atteint qu’au prix d’une démobilisation délibérée des mouvements populaires. Tout succès électoral dépend d’un plus petit dénominateur commun entre des couches sociales très diverses. C’est parce que l’élection de François Mitterrand était le seul espoir restant qu’elle fut massivement possible. Démobilisation sociale pour mobilisation électorale : ultime recours pour les uns, mais timide recours pour d’autres, c’est-à-dire pour la fraction de l’électorat que les combats du « peuple de gauche » n’effrayaient plus puisqu’ils avaient été neutralisés.
La suite découle, pour une large part, de cette gageure : appliquer une politique dont les principaux bénéficiaires n’étaient plus, ne pouvaient plus être, les acteurs. La gauche, à ce titre, était déjà socialement minoritaire. Très vite, elle a plané dans des sommets d’où l’on ne pouvait plus trouver appui sur un sol solide. La suite ? En 1993, la gauche, très logiquement, est devenue électoralement minoritaire - et socialement isolée.
2. La déroute de 1993
Il reste que la déroute de 1993 [2] n’était pas inscrite dans la défaite de 1981. Pour arriver à la débâcle, il a fallu persévérer dans l’erreur initiale. Majoritaire à l’Assemblée nationale, la gauche s’est absorbée dans un travail législatif (d’où ressortent quelques réformes positives) sans se soucier d’élaborer une politique d’ensemble susceptible de mobiliser, hors le circuit étatique, les couches populaires : comme si l’exercice du pouvoir suffisait à transformer la société. Encore cet exercice fut-il des plus timides. Parvenue au gouvernement en s’engageant à vaincre le chômage, notamment par la mise en place des 35 heures, la gauche a diminué d’une heure la durée du travail, sans autre projet. Promettant d’accorder le droit de vote aux immigrés aux élections municipales, elle a renoncé à prendre cette décision parce que l’opinion publique « n’y était pas préparé ». Cette reculade illustre à merveille la façon dont la gauche gérait sa majorité électorale ; elle a ruiné les chances que pouvait avoir le gouvernement de trouver un appui, politique et social sinon électoral, parmi les travailleurs les plus exploités, jeunes en particulier.
Et, à partir de 1993, le tournant vers la rigueur est venu parachever l’affaissement. La gestion de l’économie mixte a consisté à s’en remette au marché pour décider des choix économiques et à l’Etat pour contenir les effets des lois du marché. L’heure de l’énarchie de gauche et de ses parvenus avait dès lors sonné. Au nom de la « culture de gouvernement », l’élite rose a cru que sa présence aux postes de décision suffisait à garantir l’avenir, pourvu que ses capacités gestionnaires égalent celles de la droite. Elle a ainsi parfait son enfermement.
Plus grave encore, si l’on admet que le reculs imposés sur le terrain peuvent être moins nocifs que les reculs concédés sur les principes : pour que la défaite se transforme en déroute, il a fallu que s’accumulent les batailles perdues sans avoir été menées. C’est avec le PS au pouvoir - et sous son influence - que les problèmes de l’exclusion sociale sont devenus les problèmes de l’immigration, que la question du travail s’est muée en culture de l’entreprise, que l’École de la liberté est devenue la liberté de l’École, que le marché des biens culturels est devenu un marché comme un autre. C’est avec le PS au pouvoir que s’est révélée l’inconsistance des valeurs de gauche, quand aucun mouvement ne les porte.
On nous dit que, dans le contexte difficile de la crise mondiale, la gauche ne pouvait pas faire de miracles. Pourtant elle en a accompli plusieurs, de grande envergure : la multiplication des exclus sans autre contrepartie que le RMI, la légitimation du Profit comme moteur de la vie sociale, la sacralisation de la monnaie comme incarnation de la collectivité, la défiguration de l’idée européenne sous l’égide du libéralisme triomphant. Le résultat en est - miracle des miracles - qu’à l’heure où s’effondraient les régimes bureaucratiques de l’Est, le socialisme gouvernemental a largement contribué à discréditer dans l’opinion populaire toute idée de transformation sociale. Pourquoi dès lors, compte tenu de la célèbre « usure du pouvoir », en l’occurrence pimentée de laxisme ou de corruption, ne pas voter à droite ?
3. Et maintenant la droite...
Le 29 mars 1993, Édouard Balladur est nommé premier ministre d’un gouvernement de droite (et les reste jusqu’au 11 mai 1995) : le cinquième gouvernement du second mandat du président de la République François Mitterrand.(note de 2024)
La droite se trouve donc au pouvoir - pour longtemps peut-être [3] : une droite bien-disante, prudente dans ses promesses, modérée dans ses projets, qui va tenter désormais de résoudre des problèmes pour lesquelles elle ne dispose d’aucune solution. Son seul avantage est la copieuse majorité dont elle dispose au Parlement. Mais cet atout est relatif car le ras de marée électoral a fait désigner par les urnes un nombre important de réactionnaires convaincus qui ne s’accommoderont pas nécessairement pendant longtemps de l’habileté sirupeuse de Balladur. Et la perspective des élections présidentielles est de nature à réveiller les divergences entre Chirac, Giscard, et d’autres prétendants éventuels. Mais là n’est pas l’essentiel : la crise des sociétés européennes, qui a permis à la droite de balayer une gauche incapable d’y faire face, ne peut être qu’à l’origine de difficultés majeures pour les nouveaux maîtres de la France.
Loin de voir dans la crise de la représentation politique une crise du principe même de la représentation qu’aucune réforme électorale ne saurait enrayer, la droite ne songe qu’à pratiquer une fuite en avant, en proposant pour toutes les élections (européennes en particulier) des modes de scrutin qui marginalisent les minorités. Loin de voir dans la crise des institutions judiciaires une crise des déterminations sociales du droit, de la codification juridique des rapports sociaux et de l’insertion des décisions judiciaires dans l’espace social, la droite, poursuivant en cela l’œuvre de la gauche, ne propose que des réformes judiciaires centrées sur les procédures et les institutions. Loin de voir dans la crise des institutions républicaines une crise de la participation à l’espace public, appelant un réaménagement de sa constitution pour favoriser une authentique circulation du pouvoir, la droite ne conçoit que des réformes mineures des institutions et des mises en musique de l’exhortation : l’appel à l’effort et à la vertu républicaine, sans véritable république.
On comprend alors que la droite est incapable de juguler la crise des valeurs de citoyenneté. Des citoyens renvoyés à des formes privatisées de leur misère sociale (que quelques intellectuels, prestataires de services auprès des médias, présentent comme le triomphe de l’individualité) n’ont alors plus le choix qu’entre la rage et la soumission. Et quand la seconde prévaut, le triomphe du consumérisme dans tous les domaines de la vie sociale conforte la domination du clientélisme dans tous les aspects de la vie politique. Dès lors l’exercice du pouvoir ne peut reposer que sur le mariage forcé de la compétence technocratique et de la performance médiatique, de l’enarchie et de la démagogie.
Mais surtout la droite est incapable de résorber la crise sociale qui mine toutes les formes de domination politique. Incapable de comprendre la crise de l’État-providence comme une crise de toute forme de providence d’État quand les rapports sociaux restent inchangés, la droite se propose de réaliser un libéralisme social qui tout en transférant à l’État les charges sociales jusqu’alors affectées aux entreprises, se voit contraint de limiter au maximum les ressources budgétaires nécessaires. Incapable d’aborder le chômage comme un phénomène structurel lié aux transformations mêmes du travail productif, et plus généralement de comprendre la crise internationale comme une crise historique qui met en cause l’ensemble des modèles de développement, la droite s’obstine à vouloir faire financer des replâtrages conjoncturels par des mesures qui font passer l’immobilisme pour de la rigueur et l’injustice pour de l’austérité. Ni les privatisations, ni le gel des augmentations de salaire, ni l’augmentation de la CSG et des impôts indirects ne peuvent résoudre des contradictions majeures : leur aboutissement logique ne peut être que le renforcement de la hiérarchie sociale, base de la société « à plusieurs vitesses » dans laquelle nous sommes déjà entrés.
Les déchirures du tissu social ne peuvent que s’aggraver. Aux jeunes issus de l’immigration, on ne proposera, selon le modèle Pasqua, que l’intégration par l’humiliation. Aux jeunes menacés d’exclusion, on imposera l’insertion par la répression. Aux femmes renvoyés à leur infériorisation, on offrira l’aménagement familial de leur oppression. Aux paysans, menacés de quasi-liquidation, on fournira, avec la probable complicité de la FNSEA, les moyens de cogérer leur déclin. Aux chômeurs et aux travailleurs précarisés, on répondra par des promesses de relances conjoncturelles (par la baisse des taux d’intérêt, par la relance du bâtiment et des travaux publics etc...) et des perspectives productivistes dont les succès provisoires ne feront que différer les échecs inévitables. A tous on parlera de liberté et de solidarité. On appellera liberté, le libre exercice de contraintes intériorisées, et solidarité, la substitution d’une compassion de droite à une commisération de gauche.
Le brouillard des mots, pourtant, ne saurait, à terme, empêcher les explosions de révolte de catégories vouées au déclin social. En dépit de la sagesse prudente de nombre d’organisations syndicales, les résistances ouvrières aux licenciements ne sont pas vouées à l’extinction, et les révoltes paysannes dans les zones rurales menacées de désertification ne peuvent durablement disparaître. Mais ce sont, peut-être, les couches sociales frappées directement par l’exclusion qui constituent la réserve principale des mouvements de protestation sociale de demain.
Les simulacres d’insertion qui sont proposés ne peuvent neutraliser quoi que ce soit. Ces simulacres, au contraire, peuvent devenir des cibles du mécontentement. Ainsi en va-t-il des pieux discours parlementaires sur la « crise de la ville » dont on ne saurait croire un seul instant qu’ils aient une quelconque portée pratique : on ne combat pas la marginalisation sociale en confondant l’espace où elle est circonscrite (les banlieues) avec ses causes fondamentales. Ainsi en va-t-il des discours sur le système scolaire : son extension le menace d’implosion sous le poids des contradictions qui le minent, quand l’ école, chargée d’instruire et d’intégrer, devient le lieu d’une misère culturelle douloureusement ressentie, et surtout, d’une exclusion sociale qu’elle dissimule en l’enfermant dans ses murs, simples obstacles temporaires à l’entrée dans le chômage. Cette école-là peut devenir l’école-émissaire d’une révolte qu’annonce déjà la montée de la violence dans les lycées.
4. La décennie de tous les dangers
Les crises sont certaines ; leur issue ne l’est pas. La multiplication des révoltes peut entraîner un échec de la droite. Mais que celle-ci réussisse ou échoue, l’avenir est gros de dangers.
La réforme du Code de la nationalité, en cours au moment où nous écrivons, n’aurait valeur que d’avertissement, si elle ne laissait entrevoir à quelles infamies la droite s’abandonne quand rien ne s’oppose à elle. Plus généralement dans l’hypothèse d’une réalisation, même partielle de ses projets, la défaite, non plus seulement de la gauche, mais des forces sociales qui se sont longtemps identifiées à elle, serait profonde. Mais dans l’hypothèse où un blocage social déboucherait sur une crise institutionnelle, rien n’indique qu’un changement positif serait à la clé : la violence des révoltes ne peut aboutir que si elle trouve une expression politique adéquate. On est loin du compte à l’heure actuelle.
C’est dans ce contexte qu’il faut tenir compte du Front National qui, lors des dernières législatives, a monté qu’il avait stabilisé son influence sur tout le territoire national. Dans certaines régions - le midi méditerranéen, mais aussi la banlieue parisienne - il a conquis une audience de masse. Il est peu probable que le mouvement de Le Pen connaisse une croissance comparable à celle des fascismes historiques. Mais au cas où la crise sociale et institutionnelle s’approfondirait, il peut apparaître comme un recours : une partie des extrémistes de droite qui, aujourd’hui, font partie de la majorité parlementaire, peut voir en lui, des municipalités au gouvernement, un allié possible. Inutile de souligner ce que signifierait un tel partenariat. Cette hypothèse - sinistre - doit être prise en considération car, aujourd’hui et pour longtemps encore, deux phénomènes jouent en faveur du Front National : la montée des nationalismes et la généralisation de la désespérance sociale dans toute l’Europe.
Il faut prévenir ce danger. On ne le fera pas en utilisant les seuls moyens de l’ « antifascisme » traditionnel : la montée de la droite et de ses ailes extrémistes se nourrit des délabrements du tissu social et du système politique ; il n’est envisageable d’y faire face qu’en intervenant au niveau même où la crise prend sa source, en redonnant vie à un projet de transformation sociale. C’est ici que commence le drame : grabataire depuis des années, la gauche, il faut le répéter, est maintenant trépassée. Du moins dans les projets qui l’on fait vivre jusqu’alors. En effet, le constat de décès ne vaut pas enterrement des organisations existantes : le Parti communiste peut encore stagner autour de 10% de l’électorat et l’on peut faire confiance aux politiciens socialistes pour doper le squelette de ce qui fut le parti de Jaurès. Par contre, l’époque historique où partis de gauche et syndicats constituaient une force politique porteuse d’une « alternative » est achevée. Et la gauche français est à l’avant-garde d’une ruine qui menace toutes les gauches européennes.
5. Refonder ?
Sur les décombres d’une gestion social-démocrate, se multiplient les appels à une refondation. Encore faut-il indiquer avec clarté que celle ci ne saurait se confondre avec la refondation de la Gauche, quand elle est limitée à une redistribution des forces politiques et indexées sur des échéances électorales. Il faut reconstruire en déblayant les débris, procéder à une refondation qui mérite son nom par la profondeur de son creusement.
C’est une rupture, théorique et pratique, avec la tradition - toutes les traditions - de la Gauche qui est nécessaire. Déblaiement, mais non renoncement. Rupture, mais non abdication. Cette rupture n’est possible - et ce point est essentiel - qu’au prix d’un retour critique sur l’expérience historique du mouvement ouvrier : les références théoriques qui l’ont fondée, les pratiques politiques qui l’ont portée. La faillite du stalinisme et la crise de la social-démocratie interpellent aussi les minorités qui ne se sont pas confondues avec les courants dominants. Il ne s’agit pas de satisfaire par là une quelconque conscience militante malheureuse, mais de répondre à une question essentielle : quelles visions théoriques, quelles formes d’action, quelles conceptions politiques ont pu faciliter les déformations, monstrueuses ou lamentables, qui ont ruiné les espoirs d’émancipation : rien ne doit échapper au crible de la critique.
C’est ainsi qu’elle pourra, sans reconduire les erreurs du passé, se tourner vers l’avenir, et choisir des cibles - parmi lesquelles on peut mentionner, à titre indicatif et sans prétendre être exhaustif, les suivantes : tenter d’identifier quels peuvent être les acteurs du changement social ; comprendre les ressorts et tirer les conséquences de la volonté d’autonomie que l’évolution de la société tend à renforcer, et dont témoignent à titre de symptômes du possible, toute une série de luttes (et leurs coordinations) de ces dernières années ; reprendre la critique des formes de l’exploitation et de la domination, des rapports sociaux de sexes et des rapports de pouvoir pour préciser les conditions d’une lutte contre toutes les formes d’oppression à laquelle l’exclusion, la marginalisation de catégories sociales entières, l’oppression maintenue et renouvelée des femmes confèrent une priorité indiscutable ; approfondir l’examen des transformations du travail productif pour en mesurer les effets sur le contenu des combats à venir et des formes de vie qu’elles appellent ; réinscrire cette critique dans celle des formes de représentation politique, de codification juridique, de domination étatique. Cette critique, théorique et pratique, de la société est déjà à l’œuvre, mais encore lacunaire et dispersée, comme le sont les luttes qui en gouvernent l’intention. Mais l’on peut contribuer à bâtir sur ce sol le projet politique et trouver à ces luttes l’expression politique qu’appellent les défis de la crise mondiale.
C’est à ces conditions que la résistance à la course à la barbarie deviendra efficace. C’est à ce prix que pourra être mise en place une stratégie qui ne se borne pas à la conquête de l’Etat et un projet de société qui soit fondé sur les demandes réelles des victimes de l’exploitation et de l’oppression.
Faire de la politique autrement, ce n’est ni faire la même politique autrement, ni même faire autrement de la politique, sans s’interroger sur la politique qu’il faut faire. C’est comprendre qu’un volonté citoyenne ne se forge pas principalement dans les partis et dans les isoloirs, mais par et dans la constitution d’un espace public de débats et de pratiques. C’est comprendre qu’un projet social ne se forge pas à l’extérieur du mouvement social et, sans leur participation, en direction de ses acteurs. C’est comprendre qu’il n’y pas de pouvoir à prendre s’il n’y a pas d’avenir à conquérir. À ceux qui trouveraient ce chemin trop long, il suffira peut-être, pendant quelques temps encore et avant que ils ne soient gagnés par l’oubli, de rappeler où nous ont conduit les raccourcis.
Denis Berger et Henri Maler
10 mai 1993
P.S (2024) Trente ans après, force est d’admettre que, contrairement à ce que pronostiquait cette analyse la décennie qui a suivie ne fut pas celle de tous les dangers. En revanche, les principaux problèmes diagnostiqués alors sont encore d’actualité.