De Foucault à Marx. Ébauche de cartographie d’un champ de bataille

Cet article, publié pour la première fois sur le site de Contretemps le 9 juillet 2015, date de 2004 [1]. Mais peut-être n’a-t-il pas trop vieilli. Il se bornait alors à planter quelques jalons préparatoires à un livre…qui n’a jamais vu le jour. Il ne tient compte ni des évolutions du « dernier Foucault » (et en particulier des analyses qu’il a consacrées au néolibéralisme), ni des ouvrages sur Foucault et Marx parus depuis [2]. Il est donc « à suivre »…

* * *

Foucault n’a cessé de penser à l’écart du marxisme (et souvent contre lui) et dans l’écart à Marx (et parfois avec lui).

Prélever quelques moments de son trajet (jusqu’en 1979) permet d’en restituer la relative cohérence et de circonscrire l’espace d’une confrontation, à condition de laisser provisoirement les objections en retrait, plutôt que de laisser parler un marxisme ventriloque qui mesure tout savoir à son orthodoxie.

I. À l’écart du marxisme

Foucault n’a jamais dissimulé son aversion pour toutes les variétés - académiques ou étatiques - du marxisme orthodoxe et ses réticences à l’égard de toutes les variétés de marxisme critique. Mais ces refus et ces retraits - d’abord discrets, puis de plus en plus explicites après la parution de Les Mots et les Choses - reposent sur une argumentation plus cohérente qu’il n’y paraît de prime abord, même si elle souffre d’emblée d’une faiblesse majeure : la tentation, à quelques nuances près, d’amalgamer tous les marxismes au marxisme stalinisé et de réduire leur diversité aux variétés d’une seule et même espèce.

Ce que Foucault met d’abord en cause dans le marxisme ce sont le statut (scientifique) et la fonction (prophétique) du savoir auquel il prétend. Sous ces deux aspects, cette prétention au savoir est indissociable des techniques de pouvoir qui l’impose et des effets de pouvoir qu’elle produit. C’’est pourquoi, de 1967 à 1984, la critique du marxisme par Foucault se radicalise : de la critique d’une forme du savoir à celle d’une forme de pouvoir/savoir.

Le marxisme comme savoir

Dès 1967, la critique du marxisme dominant par Foucault est indissociable – par-delà ses effets polémiques de conjoncture – de la critique de la philosophie consacrée : Foucault, au fond, traite le(s) marxisme(s) comme une forme de ce dogmatisme propre à toute philosophie qui se présente comme une discipline. Autrement dit, la mise à l’écart du marxisme-doctrine est indissociable de celle de la philosophie-discipline.

La philosophie prétend légiférer en tout : tous les problèmes deviennent son problème ; tous les objets sont ses objets ; tous les temps sont de son temps - éternel. C’est avec cette philosophie législatrice, juchée sur la hauteur qu’elle s’attribue, drapée dans la normativité qu’elle s’arroge, vautrée dans sa propre exégèse, que Foucault a voulu rompre : autant dire avec la philosophie qui se comprend et se pratique comme une discipline autonome.

De cette philosophie souveraine, dans la version japonaise de sa réponse à Derrida, Foucault conteste, en 1972, trois « postulats » : qu’il existe un rapport fondamental de tout discours rationnel avec la philosophie si bien qu’il suffit de critiquer la philosophie implicite d’un discours pour être quitte de tout examen de son contenu ; qu’il existe des « fautes » contre la philosophie qui ont valeur de condamnation ultime ; que « la philosophie est en deçà et au-delà de tout événement ». Et Foucault de conclure : « c’est en leur nom que la philosophie se présente comme la critique universelle de tout savoir (premier postulat), sans analyse réelle du contenu et des formes de ce savoir ; comme injonction morale à s’éveiller à sa propre lumière (deuxième postulat), comme perpétuelle réduplication d’elle-même (troisième postulat) dans un commentaire infini de ses propres textes et sans rapport à aucune extériorité. » [3] Cette philosophie souveraine est donc une philosophie recluse : quand elle prétend détenir la vérité de tous les discours et refuse de se soumettre à d’autres discours que le sien, se condamne, quand elle n’en tire pas gloire, à vivre retranchée et enroulée sur elle-même.

Pour Foucault par conséquent, la philosophie a cessé ou doit cesser de se concevoir comme une discipline, régalienne et autarcique, reconnaissable exclusivement à ses œuvres et à ses auteurs et dédiée à leur infini commentaire ; elle doit s’exercer comme une activité : une activité multiforme et immanente qui s’exerce dans les différents champs du savoir, mais aussi une activité spécifique et autonome, qui se donne pour objectif non de légiférer, mais de diagnostiquer.

Du même coup, la philosophie et, plus généralement, les intellectuels doivent renoncer à la posture prophétique [4]. Dans le rôle de prophète, le philosophe ou l’intellectuel prétend à la fois annoncer le futur au lieu de diagnostiquer le présent et légiférer sur le présent au nom de ce futur. Une telle posture est incompatible avec l’activité théorico-politique du diagnostic. La philosophie doit avoir pour fonction de problématiser le présent en fonction du passé et non de prophétiser l’avenir en jaugeant le présent : se proposer, non de prophétiser, mais de problématiser.

Comment ne pas reconnaître, dans cette critique de la philosophie, une critique qui englobe les marxismes dominants : le marxisme académique et universitaire, retranché derrière le commentaire de Marx ; le marxisme qui se prévaut d’être une science, la science de l’histoire, voire la science des sciences, mesurant tous les savoirs à son autorité ?

Selon Foucault, c’est à rebours de sa fonction véritable – celle d’une contre-science – que le marxisme prétend au statut de science et le surcroit d’autorité que les marxistes attendent de cette sacralisation témoigne d’une étrange insécurité [5]. Une telle prétention place le marxisme académique en contradiction avec lui-même : pour se faire valoir comme science, le marxisme devrait renoncer au commentaire du fondateur, pour montrer « au nom de cette science, en quoi Marx s’est trompé » [6].

Le marxisme qui se donne, alternativement ou conjointement comme la science des sciences (le matérialisme dialectique) et la science de l’histoire (le matérialisme historique) reproduit les ambitions de la philosophie régalienne. C’est précisément parce qu’il se refuse à suivre « cette espèce de philosophie qui tient ou veut tenir un discours de vérité sur n’importe quelle science », que Foucault prend ses distances avec le marxisme, notamment avec « certaines formes de marxisme “rénové” » dans lesquels croit déceler la tentation de s’ériger en science : une « tentation semblable » à celle du « projet positiviste », celui de « faire la loi en toute science » [7]. Et c’est parce qu’il conteste la tendance de l’historicisme au XIXe siècle à « faire passer au compte de l’histoire le pouvoir législateur et critique de la philosophie » [8], que Foucault, en récusant cette sacralisation de l’histoire, refuse de recevoir le marxisme comme la science de l’histoire.

Pis : le marxisme qui se donne comme cette science de l’histoire reconduit les impasses de la philosophie autarcique : les tenants de cette prétendue » science - que Foucault désigne comme des marxistes « mous » - non seulement cumulent « la méfiance à l’égard du matériel historique » et « le respect infini pour le texte », mais surtout, prisonniers de leur académisme et du commentaire de texte, ils se complaisent dans la pauvreté de leurs analyses de l’histoire, si ce n’est dans leur ignorance [9].

Aux yeux de Foucault, replié sur sa fonction législatrice, enfermé dans l’exégèse, rivée à des prétentions scientifiques et prophétiques qui reproduisent la philosophie doctrinale avec laquelle il rivalise, le marxisme se dispense d’analyser la réalité historique. Comment ce marxisme pourrait-il contribuer au diagnostic du présent ?

Certes, au marxisme prisonnier de ses « habitudes mentales » - histoire linéaire, analyse strictement causale, hiérarchie des déterminations – Foucault oppose occasionnellement un autre marxisme qu’il associe au nom de Marx et qui continue à exister comme « tentative pour déterminer en quelle conjoncture notre action se trouve aujourd’hui possible » et donc de « diagnostiquer les conditions de notre existence. » [10]. Il n’en demeure pas moins que le marxisme est, aux yeux de Foucault, généralement stérile. Et s’il en est ainsi, c’est que le marxisme dominant n’est pas seulement une forme de savoir dogmatique, mais une figure du savoir indissociable de ses effets de pouvoir : une figure du pouvoir/savoir.

2. Le marxisme comme pouvoir/savoir

Deux textes de Foucault invitent particulièrement à comprendre ainsi le marxisme : un cours au Collège de France de janvier 1976 et un entretien réalisé au Japon en 1978, qui radicalise la critique par cette question : « Comment se débarrasser du marxisme ? » [11].

Dans cet entretien, proposant de distinguer Marx et le marxisme, Foucault attribue à ce dernier des effets de dessèchement de l’imagination politique [12]. Comment les expliquer ? Réponse de Foucault : « pour bien réfléchir là-dessus, il faut garder à l’esprit que le marxisme n’est rien d’autre qu’une modalité de pouvoir dans un sens élémentaire » [13]. Les effets de stérilisation sont aussi des effets de domination. On comprend alors pourquoi la question qui se pose alors est radicale « comment se débarrasser du marxisme ? »

Les déficiences du marxisme dans ses capacités d’analyse du pouvoir font corps avec l’inscription du marxisme dans les mécanismes d’exercice du pourvoir. Et Foucault de préciser, après avoir détaillé quelque peu son analyse : « les trois aspects du marxisme, le marxisme en tant que discours scientifique, le marxisme en tant que prophétie et le marxisme en tant que philosophie d’Etat ou idéologie de classe, sont inévitablement liés intrinsèquement avec l’ensemble des rapports de pouvoir. » [14].

Reprenons, avec Foucault lui-même, ces trois aspects, en se bornant ici à les exposer pour ne pas désamorcer leur force d’interpellation.

Le marxisme comme science est une manifestation de pouvoir et en reconduit les effets. Foucault dans son cours du 7 janvier 1976, invite à « s’interroger sur l’ambition de pouvoir qu’emporte avec soi la prétention à être une science ». De là ces questions : « Quels types de savoir voulez-vous disqualifier au moment où vous vous dites être une science ? (…) Quelle avant-garde théorico-politique voulez-vous donc introniser pour la détacher de toutes les formes massives, circulantes et discontinues de savoir ? ». Et de là cette réplique à ceux qui tentent d’établir que le marxisme est une science : « Je vous vois en train de lier le discours marxiste, et je vous vois affecter à ceux qui tiennent ce discours des effets de pouvoir que l’Occident, depuis maintenant le Moyen-Age a affectés à la science et a réservés à ceux qui tiennent un discours scientifique [15]. ».

Du marxisme comme science est indissociable le marxisme comme prophétie. De façon générale, le discours prophétique – des prescriptions aux propositions - produit des effets de domination : « Du moment qu’on « propose », on propose un vocabulaire, une idéologie, qui ne peuvent avoir que des effets de domination » [16]. C’est pourquoi, « le rôle de l’intellectuel aujourd’hui n’est pas de faire la loi, de proposer des solutions, de prophétiser, car, dans cette fonction, il ne peut que contribuer au fonctionnement d’une situation de pouvoir déterminée qui doit, à mon avis être critiquée » [17]. Une posture prophétique produit inévitablement un double effet de dépossession des acteurs de l’histoire et de capture de la vérité. Tel est le sort du marxisme : « ... le marxisme en tant que science... est une dynamique aux effets coercitifs à propos d’une certaine vérité. Son discours est une science prophétique qui diffuse une force coercitive sur une certaine vérité, non seulement en direction du passé, mais vers l’avenir de l’humanité » [18]. Et Foucault de relever, dans le texte de Marx lui-même, un « jeu entre la formation d’une prophétie et la définition d’une cible » : les dangers de la premières menacent de neutraliser la fécondité de la seconde [19].

Quant au marxisme comme philosophie d’Etat, il est inutile de revenir sur ce qu’elle fut sous le règne de Staline en URSS et alentour.

De tout cela résulte, une prise de position générale : « Je ne suis ni un adversaire, ni un partisan du marxisme ; je le questionne sur ce qu’il a à dire au sujet des expériences qui posent des questions à son sujet [20]. » À l’écart du marxisme, donc, mais quoi qu’il en dise ici, généralement contre lui. Pourtant, penser à l’écart du marxisme ne signifie pas se tenir à l’écart de Marx. Quel Marx et comment ?

II. Dans l’écart à Marx

Se tenir à l’écart du marxisme, c’est aussi se tenir à l’écart de l’obligation de référence à Marx ou, du moins, d’un certain type de référence à Marx : « Marx, pour moi, ça n’existe pas. Je veux dire cette espèce d’entité qu’on a construite autour d’un nom propre, et qui se réfère tantôt à un certain individu, tantôt à la totalité de ce qu’il a écrit, tantôt à un immense processus historique qui dérive de lui [21]. »

Le refus d’accoler le nom de Marx à des réalités disparates et de se prononcer conjointement ou alternativement sur l’individu Marx, sur l’ensemble de ses textes et le processus historique associé à son nom n’est pas une dérobade. On ne peut se débarrasser du marxisme, du moins dans la version qu’en retient Foucault, sans se débarrasser du rapport à Marx que suppose la référence à cette entité. Ce Marx-là est d’emblée inscrit dans le débat qui oppose le marxisme et l’antimarxisme et relève de l’assignation à résidence. Marxiste ou antimarxiste ? Foucault refuse précisément la double sommation de décliner ou d’assigner une identité – et de céder à l’injonction d’étiquetage, qu’il s’agisse de l’étiquetage qui, au nom de Marx, enregistre ou récuse le marxisme authentique ou qu’il s’agisse, plus simplement, de l’étiquetage en fonction de son rapport à Marx.

Reste cependant, en deçà de l’ « espèce d’entité » que désigne le nom de Marx, le texte qui porte son nom d’auteur. Or il ne suffit pas, selon Foucault, de dissocier Marx du marxisme pour se tenir à l’écart du second [22]. Il faut aussi refuser le privilège accordé à l’œuvre (et à son auteur) parce qu’elle porterait en elle une vérité – sa propre vérité – qu’aurait pour charge de révéler son commentaire : « Faire fonctionner Marx comme un “auteur”, localisable dans une mine discursive unique et susceptible d’une analyse en termes d’originalité et de cohérence interne, c’est toujours possible. Après tout, on a bien le droit d’“académiser” Marx. » [23]. Ce Marx-là, pour Foucault n’existe pas : tenu à l’écart, quand il n’est pas simplement mis au rencart.

Pour se défaire du rapport à Marx impliqué dans le marxisme, il convient donc d’éviter de tomber « dans le piège des solutions traditionnelles » [24]. Et Foucault de renouveler son refus de soumettre le texte de Marx au travail du commentaire (chargé de dévoiler sans fin le texte-secret sous le texte-apparent) et, plus généralement de le soumettre à l’épreuve de la vérité : qu’il s’agisse de vérifier ou de réfuter ses propositions ou de rétablir une vérité du texte qui serait chargé de dénoncer les erreurs de ses successeurs ou les trahisons de son accomplissement [25].

Ainsi, Foucault tente de soustraire aux formes classiques de l’alternative entre la critique interne et la critique externe : une critique interne qui, toujours menacée de reconduire les impasses du commentaire, aurait pour charge de découvrir le vrai ou le bon Marx ; une critique externe qui, toujours menacée de reconduire les illusions du marxisme (ou de l’antimarxisme), aurait pour rôle de valider ou d’invalider ses prétentions scientifiques. C’est pourquoi la critique de Marx par Foucault n’est pas une critique par validation ou réfutation démonstrative, destinée à dresser l’inventaire du vrai et du faux ; c’est une critique par dissociation, qui tente de faire le ménage dans la boite à outils et de distinguer ce qui est hors d’usage et ce qui peut encore servir. C’est donc à condition faire porter le travail de dissociation sur le texte de Marx que l’on peut parvenir à dissocier Marx du marxisme.

Mais, si l’on renonce à recourir aux formes traditionnelles de la critique, comment faire ?

L’une des premières confrontations explicites de Foucault avec le texte de Marx est particulièrement éclairante. Alors que la rédaction de Les Mots et les Choses est largement entamée (une première rédaction sera achevée à la fin de 1964), Foucault présente au colloque de Royaumont sur Nietzsche, qui se tient du 4 au 8 juillet 1964, la communication intitulée « Nietzsche, Freud, Marx » [26]. Trois noms dont la succession suggère une égalité de traitement, mais dont le classement n’est pas chronologique : le texte de Foucault non seulement privilégie Nietzsche, mais déclasse subtilement Marx. Apparemment, ce texte d’équilibriste se présente comme une tentative de dissocier Marx du marxisme, en opposant l’interprétation infinie chez Marx et l’interprétation finie chez ses successeurs : « Une herméneutique qui se replie (...) sur une sémiologie croit à l’existence absolue des signes : elle abandonne la violence, l’inachevé, l’infinité des interprétations pour faire régner la terreur de l’indice, et suspecter le langage. Nous reconnaissons les marxismes après Marx. » [27]. On pourrait croire alors que Foucault tente de sauver un vrai Marx du marxisme. En vérité, Foucault propose une tentative d’opposer Nietzsche à Marx, en opposant la transvaluation à la dialectique, conformément à ce que Deleuze enseigne : « (...) le surhomme est dirigé contre la conception dialectique de l’homme, et la transvaluation contre la conception dialectique de l’appropriation ou de la suppression de l’aliénation ». Il apparaît alors que Foucault propose, non un vrai Marx, mais un point de vue nietzschéen sur Marx : « Il est certain qu’il y a, dans les techniques d’interprétation de Nietzsche, quelque chose qui est radicalement différent, et qui fait qu’on ne peut pas, si vous voulez, l’inscrire dans les corps constitués que représentent actuellement les Communistes d’une part et les Psychanalystes de l’autre. » [28]. C’est l’adoption de ce point de vue qui, parce qu’elle permet de se dégager de l’emprise de Marx, permet du même coup de désolidariser Marx du marxisme.

Ainsi, à la critique bruyante qui tient « Marx » sous sa férule, Foucault préfère une critique discrète, mais méthodique, dont il est indispensable, mais souvent malaisé, d’établir les coordonnées.

La critique de Marx dans Foucault est prise, en général, dans des critiques latérales : des critiques indirectes qui le visent à travers les divers marxismes et des critiques obliques qui l’intègrent ou le discutent sans le nommer, à charge pour les commentateurs, précisément, de rétablir les notes en bas de page volontairement effacées [29]. Marx est inscrit sans nul doute dans le travail de Foucault, mais rarement localisable ; inscrit, mais généralement sur la liste des abonnés absents.

Pourtant, deux critiques frontales méritent d’être retenues : deux critiques « à coups de marteau », pour reprendre l’expression de Nietzsche [30], prises aux deux pôles de la théorie : archéologie du savoir et généalogie du pouvoir. À un pôle, Foucault critique le mariage de l’anthropologie et de la dialectique. À l’autre pôle, il critique le mariage de l’Etat et de la Révolution. Mais, en dépit de la violence des coups, un travail de décantation s’effectue. [31] L’œuvre de Marx n’est pas refermée sur elle-même : elle ne fait l’objet ni d’un débat, ni d’un combat. Soustraite à la tentation de la réfutation, elle est prise dans le maillage critique tissé par l’archéologie du savoir et la généalogie du pouvoir.

1. Le filtre archéologique

Premier coup de marteau : dans Les Mots et les Choses, Foucault critique « les promesses mêlées de la dialectique et de l’anthropologie », qui culminent chez Marx dans une « utopie d’achèvement » [32]. Plus exactement, sans être nommément désigné, Marx est pris dans cette critique qui repose sur la thèse très fragile d’une appartenance de la critique marxienne de l’économie politique à l’épistémè du XIXe siècle, dont Ricardo et Marx serait les figures opposées et jumelles.

Mais les coups de marteau destinés, selon Nietzsche, à « forcer à parler haut ce qui voudrait se taire » menace de réduire au silence ce qui pourrait encore nous parler. Il convient alors mesurer, mais avec Foucault lui-même, les déficits de l’archéologie du savoir si elle se replie sur elle-même.

À l’évidence, la critique archéologique d’une utopie ne suffit pas à rendre compte de ses effets théoriques.

Ainsi, c’est moins l’anthropologie de Marx que les tentatives d’ « anthropologiser Marx » que Foucault dénonce : les tentatives de sauvetage de la souveraineté du sujet « contre le décentrement opéré par Marx - par l’analyse historique des rapports de production, des déterminations économiques et la lutte des classes » [33]. Étendue, l’archéologie du savoir invite donc à dissocier les énoncés prisonniers du passé et ceux qui sont encore actifs : entre le domaine de l’économie politique et le domaine du savoir historique (ou, comme on peut le voir, dans les rares références de Foucault, le Livre I du Capital et le 18 Brumaire) [34]. Marx, précurseur donc, voire fondateur.

Foucault, en effet, classera Marx (au même titre que Freud) parmi ceux qu’il propose d’appeler « les fondateurs de discursivité », qui ne sont pas seulement des auteurs de leur œuvre, mais « ont produit quelque chose de plus : la possibilité et la règle de formation d’autres textes » et « ont établi une possibilité indéfinie de discours ». Marx ne serait alors que le fondateur des marxismes. Mais à la différence de la fondation d’une science, « l’instauration discursive est hétérogène à ses transformations ultérieures » [35] : elle rend par conséquent possible le retour (divers retours) au texte : « au texte même, au texte dans sa nudité, et, en même temps, pourtant (...) à ce qui est marqué en creux, en absence, en lacune dans le texte » [36]. Le privilège de l’œuvre a été mis entre parenthèses : les retours ne nous découvrent pas une œuvre dans sa vérité, mais un texte dans sa nudité, offert à un travail de dissociation et de réimplantation.

L’archéologie du savoir agit précisément comme un filtre qui permet de partager le dépôt historique et l’excédent théorique. Sont alors rendues possibles des appropriations partielles. Ainsi en va-t-il de l’inscription de Marx dans la filiation de l’herméneutique moderne, dans l’histoire du savoir historique contemporain ou, comme on va le voir, dans les propositions de l’analytique du pouvoir.

Marx n’est pas sans héritage : aussi Foucault n’hésite-t-il pas à capter une partie de cet héritage pour en faire des usages circonscrits. Mais, si le texte de Marx n’est pas définitivement assignable à son siècle, il n’en devient alors que plus insaisissable, et en même temps plus disponible pour le meilleur peut-être, mais aussi pour le pire : son inscription dans l’exercice de nouvelle formes de domination.

Pourtant - c’est une seconde évidence - la critique archéologique d’une utopie ne saurait suffire à rendre compte de ses effets pratiques.

Les promesses de la dialectique et de l’anthropologie peuvent bien n’être pas tenues - parce qu’elles ne sont pas tenables : cela n’explique pas comment elles ont pris part – si elles l’ont fait – aux désastres du siècle. La critique de Foucault, alors inachevée, doit remonter des effets à la théorie et expliquer ce qui en elle, comme pensée ou impensé, peut favoriser son destin. La critique archéologique est prolongée par une critique généalogique qui prend le relais. Selon la première critique la pensée de Marx semble rivée à son socle, et appartenir entièrement au XIXe siècle. Selon la seconde, la pensée de Marx se confond avec ses effets, et est entièrement solidaire du XXe siècle : non plus cette fois comme auteur d’une innocente utopie, mais comme pourvoyeur d’une sinistre réalité.

S’impose alors une nouvelle critique par dissociation qui fait jouer cette fois le filtre généalogique et invite à distinguer l’analytique du pouvoir et le discours de la Révolution.

2. Le filtre généalogique

Second coup de marteau : dans La grande colère des faits, dix ans plus tard, Foucault, dans un éloge inconditionnel de l’essai d’André Glucksmann - Les Maîtres penseurs - dénonce dans la théorie de Marx une variante du mariage entre l’État et la Révolution qui fait apparaître le stalinisme comme « la vérité “un peu” dépouillée, c’est vrai, de tout un discours qui fut celui de Marx et d’autres peut-être avant lui » [37].

Foucault soutient que, de Marx au stalinisme, « il n’y avait pas “faute” on était resté dans le droit fil [38]. » Mais de quelle continuité s’agit-il ? Foucault retient, mais à sa façon, la pitoyable critique proposée par André Glucksmann  : la philosophie allemande a célébré le mariage de l’État et de la Révolution. De là ce diagnostic qui englobe Marx : « toute nos soumissions trouvent leurs principes dans cette double invite : faites vite la Révolution, elle vous donnera l’État dont vous avez besoin ; dépêchez-vous de faire un État, il vous prodiguera généreusement les effets raisonnables de la révolution. Ayant à penser la Révolution, commencement et fin, les penseurs allemands l’ont chevillée à l’État et ils ont dessiné l’État-Révolution, avec toutes ses solutions finales [39]. »

Mais rabattue sur de tels énoncés, la critique généalogique menace de tourner court.

D’abord parce que le procès en filiation enjambe, du moins sous cette forme, l’histoire qu’il prétend analyser.

Peut-être, de Marx au stalinisme, est-on resté « dans le droit fil », au point que « ceux qui cherchaient à se sauver en opposant la vraie barbe de Marx au faux nez de Staline n’aimèrent pas du tout ». Mais laisser un instant, avec Foucault, les adeptes d’un vrai Marx à leur déplaisir n’impose pas d’exhiber le crâne de Marx en le présentant comme celui de Staline enfant. En particulier, le prétendu étatisme de Marx mériterait examen : s’agit-il d’un étatisme par excès ou d’un étatisme par défaut ? La révolution est-elle chevillée à l’Etat comme à un moyen condamné à se retourner contre elle en raison d’un éloge aveugle de l’Etat ou en raison d’une critique borgne de cet État ?

La première critique est difficilement tenable : on pourrait lui opposer des dizaines de textes qui démentent l’existence d’un culte marxien de l’Etat quel qu’il soit. Elle difficilement tenable surtout quand Marx soutient, sans lever toutes les équivoques, que la forme d’Etat à laquelle est (ou doit-être) chevillée la Révolution est dessinée par la Commune de Paris. Mais, dans son éloge du livre d’André Glucksmann, en attribuant le désastre stalinien à un prétendu culte de l’État par Marx lui-même, met en question la perspective même d’une révolution. Et deux ans plus tard, plutôt que de la juger nécessaire, il se demandera si la révolution est « désirable » [40], incitant ainsi, sans l’avoir fait lui-même - et peut être sans l’avoir cru possible - à repenser son concept et son contenu

Reste la seconde critique, qui met en évidence que les effets d’une pensée coïncident avec les effets de ses impensés. Certes Marx n’a pas réduit le pouvoir à celui qu’exerce l’État : « on ne trouve pas chez Marx lui- même », déclare explicitement Foucault, « le schématisme (...) qui consiste à localiser le pouvoir dans l’appareil d’Etat, et à faire de l’appareil d’Etat l’instrument privilégié, majeur, presqu’unique, du pouvoir d’une classe sur une autre » [41]. Mais on peut reconnaître, et cependant négliger la spécificité des rapports de pouvoir et la mobilité des technologies de pouvoir : « ...entre l’analyse du pouvoir dans l’état bourgeois et la thèse de son dépérissement futur, font défaut l’analyse, la critique, la démolition, le bouleversement des mécanismes de pouvoir » [42] : la thèse même d’une destruction de l’appareil d’État bourgeois est grevée par l’ignorance des pouvoirs qui le sous-tendent et menacent d’en reconduire tous les effets. Ainsi, la Révolution est à ce point nouée à l’État qu’elle menace de se condamner elle-même : c’est parce que il néglige de s’attaquer aux rapports de pouvoir qui soutiennent l’existence de l’État et aux technologies de pouvoir qu’il centralise, que le discours de Marx laisse le champ libre à l’étatisme forcené que par ailleurs il prétendait combattre. Étatisme par défaut : telle serait la leçon de l’analytique du pouvoir qui, menée à l’écart de Marx, permet de penser dans l’écart à Marx et, sur ce point, contre lui.

Pourtant – c’est une seconde objection - le discours de Marx sur la révolution n’épuise pas sa contribution à une analytique du pouvoir. Il suffit de mentionner ici quelques indices laissés par Foucault lui-même.

Ainsi, la distance prise par Foucault avec les analyses marxistes, classiques ou critiques, dans Surveiller et Punir ne va pas sans reconnaissance des proximités : Marx n’a pas méconnu les rapports de pouvoir imbriqués dans les rapports de production, comme le rappelle Surveiller et punir en 1976, en faisant référence discrète, par une note en bas de page, aux analyses de Marx sur la discipline de fabrique dans Le Capital [43]. Et comment ne pas lire dans La société punitive, le cours au Collège de France dispensé en 1972-1973 [44], avant la parution de Surveiller et punir, les traces à peine effacées de la critique marxienne ?

Il en va de même, mais d’un autre point de vue, dans La volonté de Savoir. Dans cet ouvrage, la critique du freudo-marxisme, dans La Volonté de Savoir, se présente comme un champ de bataille dont le relevé topologique a été rigoureusement et précisément effectué par Etienne Balibar [45]. Mais cette critique ne peut pas être tenue pour une critique de Marx. Par quelque bout que l’on prenne le texte de La Volonté de Savoir, que l’on privilégie dans l’enchevêtrement freudo-marxiste, sa composante marxienne ou sa composante freudienne, que l’on choisisse dans la double entrée qu’il propose, la porte de l’analytique du pouvoir ou celle de la mise à l’épreuve de l’hypothèse répressive sur la sexualité, Marx ne constitue pas une cible.

D’abord, ce n’est pas à Marx que Foucault impute l’hypothèse répressive qui sous-tend les énoncés du freudo-marxisme. Marx, évidemment, n’est pas concerné par cette hypothèse répressive pour autant qu’elle porte sur la sexualité. Ce n’est même pas sa filiation légitime ou à sa déformation illicite que Foucault prend à partie : ces querelles d’orthodoxie ne l’’intéressent pas. En tout cas, c’est moins l’emplacement théorique du marxisme, que l’emplacement historique de la psychanalyse qui intéresse Foucault dans sa contre-enquête. Mieux : Foucault au terme de son enquête, recourt ironiquement et allusivement à Marx pour souligner l’indifférence initiale de la bourgeoisie à l’égard du corps et du sexe des prolétaires et retourner contre ses héritiers l’idée même de sexualités de classes, dont la sexualité bourgeoise est le foyer originaire [46].

Ensuite, ce n’est pas du travail de Marx que Foucault prend le contrepied quand il propose des repères pour un « analytique du pouvoir », en dépit de certaines allusions qui semblent le viser. Ainsi, la mise en question d’une critique radicale du droit qui « se fait encore sur fond du postulat que le droit doit par essence, et idéalement, s’exercer selon un droit fondamental » [47] ne saurait en toute rigueur être appliquée à Marx, critique s’il en fût des idéalité juridiques : cette critique peut à la rigueur viser Proudhon, spécialiste d’une critique au nom du droit que Marx tourne en dérision ou les socialistes allemands de la fin du XIXe siècle. Mieux, si Marx n’est pas désigné, ce n’est pas pour mieux l’atteindre : si Marx est dissimulé dans La volonté de Savoir, c’est parce que Foucault s’adosse aux travaux de Marx.

Au moment même où, en instruisant la critique du freudo-marxisme, il décoche indirectement des flèches en direction du marxisme, Foucault prétend trouver des appuis dans l’œuvre de Marx, pour baliser et conforter les « propositions » de son analytique du pouvoir, comme le montre, un mois avant la parution de La volonté de Savoir (et alors que l’ouvrage est déjà rédigé), une conférence que Foucault prononce au Brésil [48]..

Dans cette conférence, Foucault prétend découvrir dans Le Capital les rudiments d’une analyse du pouvoir, car, dit-il, c’est « évidemment » chez Marx que l’on peut trouver « aussi » les éléments d’une « analyse du pouvoir en termes positifs » [49]. Et Foucault de s’appuyer sur Marx pour soutenir quatre propos de méthode, qui remettent en cause quatre postulats traditionnels de l’analyse du pouvoir. Au postulat de l’unité du pouvoir, Foucault oppose, à l’instar Marx selon lui, la multiplicité des pouvoirs – « la société est un archipel de pouvoirs différents » -, ainsi que leur spécificité et leur autonomie. Au postulat de leur dérivation à partir de l’État, Foucault oppose la priorité des pouvoirs locaux, - ces « petites régions de pouvoir » à partir desquelles, Marx l’aurait montré, « a pu se former, petit à petit, des grands appareils d’État ». Au postulat de fonction négative du pouvoir, Foucault oppose la productivité de pouvoir que Marx aurait mise en évidence par ses « superbes analyses de la discipline dans l’armée et dans les ateliers ». Enfin, à l’approche juridique du pouvoir, Foucault oppose l’analyse technologique des procédés de pouvoir, dont Marx aurait proposé une « esquisse » dans le livre II du Capital. [50]

Dans l’espace libéré et circonscrit par l’approche de Marx par Foucault, la confrontation peut alors devenir féconde. On se bornera ici à l’évoquer.

On doit à Foucault la mise à jour de technologies à la fois locales dans leur invention et leur mise en œuvre, et générales dans leur déploiement ; à la fois spécifiques et transférables. C’est parce que les relations de pouvoirs forment une couche spécifique que les technologies de pouvoir peuvent gagner en autonomie. Et c’est cette autonomie qui les rend transférables. En d’autres termes, c’est dans la mesure où il ne se confond pas avec les autres relations (d’exploitation, de domination) que le pouvoir est tout à la fois résistant à leur transformation (il peut demeurer sous-jacent à des transformations économiques et politiques) et mobile (transférable dans d’autres contextes d’exploitation ou d’oppression). Ainsi le nazisme et le stalinisme « ont utilisé et étendu des mécanismes déjà présents dans la plupart des autres sociétés » [51], et transféré les disciplines qui s’exercent sur les corps et les régulations qui s’exercent sur les populations : les deux pôles du biopouvoir.

On comprend alors que Marx ait abandonné ceux qui voulaient comprendre ces deux maladies du pouvoir et ne pas se laisser dissuader, fût-ce par Foucault lui-même, de bâtir un projet d’émancipation, de lui trouver quelques solides racines du côté de chez Marx... à la lecture de Foucault.

Foucault a raison : le mariage forcé de l’État et de la Révolution, chez Marx, n’est pas, mais dans les termes que l’on vient de tenter de préciser, innocent. Non seulement l’abolition des anciens rapports de domination politique et les réformes des anciennes formes d’exploitation économique n’empêchent pas de voir reconduire les technologies de pouvoir qui leur servaient de support, mais une Révolution peut-être l’occasion d’une intensification de leurs effets et de leur cumul avec ceux de nouvelles formes d’exploitation et de domination.

Au point que les tentatives de restauration démocratique peuvent laisser ces transferts opérer, à des degrés divers, en sens inverse, comme le montre la reconversion de la régulation raciste fondée sur une guerre de classe en une régulation raciste fondée sur la guerre des nations. Au point que les pays réputés démocratiques ne cessent de réinventer les quadrillages disciplinaires et les régulations xénophobes.

Qu’est-ce que nos sociétés peuvent donc avoir en commun pour qu’elles laissent proliférer des stratégies et des technologies de pouvoir, omniprésentes et réversibles, que les formes démocratiques de l’Etat parviennent à peine à tempérer ?

Quelles sont donc ces racines de la rationalité politique que Foucault invitait à attaquer ? Ne se confondent-elles pas avec l’existence de ces rapports d’exploitation que Foucault mentionne sans s’y attarder ? Ne s’enracinent-elles pas dans des formes de domination structurelles, parfois irréductibles au capitalisme (comme les rapports sociaux de genre), mais reproduites par sa logique ? Bref, peut-on se satisfaire d’une analyse relationnelle du pouvoir qui met en évidence des interactions, irréductibles sans doute aux effets des positions de classe, mais incompréhensibles sans elles ?

La réponse à ces questions peut se découvrir partiellement ... à la lecture de Marx.

Henri Maler

Notes

[1Très partiellement révisé en 2015, cette contribution, préparée à la demande de la rédaction de la revue Actuel Marx pour un numéro consacré à « Marx et Foucault » (, Actuel Marx n°36, PUF, Second semestre 2004), n’a pas été publié alors pour des raisons qui me sont restées inconnues.

[2Notamment et entre autres : d’Isabelle Garo, Foucault, Deleuze, Althusser & Marx Editions Demopolis, 6 mai 2011 et de Jacques Bidet, Foucault avec Marx, La Fabrique Editions, novembre 2014.

[3. « Réponse à Derrida », Paideia, n° 11, 1er février 1972, Dits et écrits, t. 2, p. 282-284. À noter que le passage correspondant est absent de la version française.

[4. « Prophète », « prophétie », « prophétiser » : ces vocables (et les critiques correspondantes) reviennent avec insistance dans les dits et écrits de Foucault après 1974

[5. « Entretien avec Michel Foucault », avec J.G. Merquior et S.P. Rouanet, 1971, Dits et écrits, t.2, p. 168-169.

[6. « De l’archéologie à la dynastique » (entretien avec S. Hassium réalisé à Paris le 27 septembre 1972), Umi, mars 1973, Dits et écrits, t. 2, p. 408-409.

[7. « Questions à Michel Foucault sur la géographie », Hérodote, n°1, janvier-mars 1976, Dits et écrits, t. 3, p. 29.

[8. « Sur les façons de lire l’histoire » (entretien avec R. Bellour), Les lettres françaises, n° 1187, 15-21 juin 1967, Dits et écrits, t. 1, p. 587-588, p. 598.

[9. « De l’archéologie à la dynastique », mars 1973, Dits et écrits, t. 2, p. 407-408. Voir également : « Anti-Retro » (entretien avec P. Bonotzer et S. Toubiana), Cahiers du cinéma, n° 251-252, juillet-août 1974, Dits et écrits, t. 2, p. 659.

[10. « La philosophie structuraliste permet de diagnostiquer ce qu’est “ aujourd’hui ” », (entretien avec G. Fellous), La Presse de Tunisie, 12 avril 1967, Dits et écrits, t. 1, p. 582-583.

[11. “ Il faut défendre la société ”. Cours au Collège de France 1976, Gallimard/Seuil, 1997, p. 11. Dits et écrits, t.3, p. 166-167 ; « La méthodologie pour la connaissance du monde : comment se débarrasser du marxisme », entretien avec R. Yoshimoto, 25 avril 1978, Umi, juillet 1978, Dits et écrits, t. 3, p. 595-618.

[12. « La méthodologie pour la connaissance du monde : comment se débarrasser du marxisme », op.cit., p. 599 et 600.

[13.« La méthodologie pour la connaissance du monde : comment se débarrasser du marxisme », op.cit., p. 600. Foucault est plusieurs fois revenu sur certains de ces effets : des effets de recouvrement des problèmes, que le marxisme les ignore parce qu’ils échappent à sa juridiction (comme les problèmes posés par l’Histoire de la Folie, par exemple) ou qu’il les absorbe parce qu’il prétendre étendre sa juridiction sur eux (comme l’a produit une certaine exaltation de marxisme autour de mai 98).

[14. « La méthodologie pour la connaissance du monde : comment se débarrasser du marxisme », op.cit., p. 601.

[15. “ Il faut défendre la société ”. Cours au Collège de France 1976, Gallimard/Seuil, 1997, p. 11. Dits et écrits, t.3, p. 166-167

[16. « Enfermement, psychiatrie, prison », entretien, La Folie encerclée, octobre 1977, Dits et écrits, t. 3, p. 348.

[17. « Entretien avec Michel Foucault », entretien avec D. Trombadori, fin 1978, publié en 1980, Dits et écrits, t. 4, p. 86.

[18. « La méthodologie pour la connaissance du monde : comment se débarrasser du marxisme », op.cit., p. 600.

[19. « La méthodologie pour la connaissance du monde : comment se débarrasser du marxisme », op.cit., p. 612.

[20. « Polémique, politique et problématisations », mai 1984 Dits et écrits, t. 4, po. 595.

[21. « Questions à Michel Foucault sur la géographie », Hérodote, n° 1, janvier-mars 1976, Dits et écrits, t.3. p. 38.

[22. Foucault laisse parfois entendre, dans quelques–uns de ses propos et par quelques-unes de ses tentatives, qu’il peut être satisfaisant et suffisant de dissocier Marx du marxisme Pourtant rien n’est plus étranger au style de la critique de Foucault que cette méthode de filtrage. « La méthodologie pour la connaissance du monde … »., Dits et écrits, t. 3, p. 595-618.

[23. « Questions à Michel Foucault sur la géographie », Hérodote, n° 1, janvier-mars 1976, op.cit., p.39.

[24« La méthodologie pour la connaissance du monde… », Dits et écrits, t. 3, p. 601.

[25. ibidem

[26. « Nietzsche, Freud, Marx », colloque de Royaumont, juillet 1964, Dits et écrits, t. 1, pp. 564-579.

[27. « Nietzsche, Freud, Marx », op.cit., p. 574.

[28. « Nietzsche, Freud, Marx », op.cit., p. 577.

[29. Mais c’est à contre-sens que l’on tente souvent de rétablir le nom de Marx, là où il n’est pas nommé. Comme c’est aussi à contre-sens que l’on croit parfois que l’absence du nom signalerait l’absence de la cible.

[30. Nietzsche, Le crépuscule des idoles, Avant-propos.

[31. Je reprends ici, pour la modifier, une contribution antérieure : « Marx et Foucault : Une confrontation inactuelle ? », dans Michel Foucault, Les jeux de la vérité et du pouvoir, Presses Universitaires de Nancy, 1994, 87-99.

[32. Les Mots et les Choses, Gallimard, 1966, pp. 262-275. Une critique interne de l’œuvre de Marx permet de souscrire partiellement au diagnostic de Foucault : Henri Maler, Convoiter l’impossible. L’utopie avec Marx, malgré Marx, Albin Michel, 1995.

[33. L’Archéologie du Savoir, Gallimard, 1996, p.22-23.

[34. « Sur les façons de lire l’histoire » (entretien avec R. Bellour), Les lettres françaises, n° 1187, 15-21 juin 1967, Dits et écrits, t. 1, p. 587-588 ; « Questions à Michel Foucault sur la géographie », Hérodote, n° 1, janvier-mars 1976, p. 38-39.

[35. Elle est, comme le note Raymond Bellour, « en retrait et en surplomb », (Raymond Bellour, « Vers la fiction », in Michel Foucault philosophe, Rencontre internationale de Paris, janvier 1988, Seuil, Paris, 1989, p.180).

[36. « Qu’est-ce qu’un auteur ? », Bulletin de la société française de philosophie, séance du 22 février 1969, Dits et écrits, t.1, p.804-805.

[37. « La grande colère des faits », Le Nouvel Observateur, 9 Mai 1977 (Sur A. Glucksmann, Les Maître penseurs, Éd. Bernard Grasset, mars 1977) dans Dits et écrits, t. 3. p.278

[38. ibidem.

[39. « La grande colère des faits », op.cit., p.280.

[40. « Inutile de se soulever », Le Monde, 11 mai 1979, Dits et écrits, t.3, p. 791.

[41. « Questions à Michel Foucault sur la géographie », Hérodote, n°1, janvier-mars 1976, Dits et écrits, t. 3, p.35.

[42. « Crimes et châtiments en U.R.S.S. et ailleurs », entretien avec K.S. Karol, Le Nouvel Observateur, 26 janvier 1976, dans Dits et écrits, t.3, p. 74.

[43. Surveiller et Punir, Gallimard, février 1975, pp.219 sq. (note 1, p.222). Voir également sur Marx, pp. 166, 171, 177 et sur les analyses inspirées par Marx : 29-30, 58, 78, 89, 141, 115.

[44. La Société punitive. Cours au Collège de France (1972-1973), éditions du Seuil, décembre 2013.

[45. Etienne Balibar, « Foucault et Marx. L’enjeu du nominalisme », dans Michel Foucault philosophe, Des Travaux/Seuil, 1989, pp. 54-76, repris dans La crainte des masses. Politique et philosophie, avant et après Marx, Galilée, 1997, pp. 281-303.

[46. La volonté de savoir, Gallimard, 1976 p. 167-168. Foucault cite en note un passage du Capital (Le Capital, LI, chap., 2 : « Le capital affamé de surtravail » qui, sans doute, ne mentionne pas le corps et le sexe des prolétaires, mais n’est pas le plus significatif à ce propos.

[47. La volonté de savoir, op.cit., p.117.

[48. « Les mailles du pouvoir », conférence prononcée à la faculté de philosophie de l’université de Bahia, 1er novembre 1976, Dits et écrits, t. 4, pp. 182-201. Sur cette chronologie, voir Dits et écrits, t. 1, p. 49.

[497. « Les mailles du pouvoir » op.cit., p. 186. Dans cette conférence, comme dans Surveiller et punir, Foucault se réfère au Livre II du Capital. Désinvolture qui se joue des références ? Piège intentionnel destiné à ceux qui les révèrent ? Confusion involontaire ? Les analyses que Foucault présente comme « la source d’inspiration » des siennes figurent dans le tome 2 du Livre I.

[50. « Les mailles du pouvoir », op.cit., p. 186-189.

[51. « Deux essais sur le sujet et le pouvoir », in Un parcours philosophique, op.cit. pp.297-321.

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